Le rêve d’un couple de Frelighsburg se transforme en cauchemar

DÉSILLUSIION – Isabelle Léveillée et Marcel Trahan ne savent plus où donner de la tête. Refusant de quitter sa propriété, par crainte de perdre certains droits acquis, le couple de Frelighsburg accumule les problèmes de santé depuis plus d’un an tout en vivant dans un climat d’incertitude.

«Notre endroit de rêve, au bord de la rivière aux Brochets, s’est transformé en cauchemar», résume M. Trahan, en faisant référence au petit domaine situé aux limites des rues Principale et Richford, à l’extrémité sud village.

Lors de l’achat de cette propriété, en décembre 2012, le couple Léveillée-Trahan n’était pas sans savoir que leur nouvelle acquisition était située en zone inondable et que le sous-sol de la maison avait déjà été inondé cinq ans auparavant.

«En achetant la maison, nous avions l’intention de la surélever et de l’imperméabiliser afin d’être à l’abri de toute mauvaise surprise. Nous étions prêts à dépenser 30 000 $ pour la réalisation des travaux», signale le propriétaire.

En 2013, le couple a découvert certains vices cachés (infiltration d’eau par la toiture, traces de moisissures sur le revêtement extérieur, poutre centrale fissurée) et entrepris des négociations avec l’ancien propriétaire pour obtenir un dédommagement.

En janvier 2014, lors d’une période de redoux, un embâcle s’est formé à la hauteur du parc Godhue, le niveau de la rivière a monté et la maison a été inondée. Et comme si ce n’était déjà pas assez, le contenu de la fosse septique s’est répandu dans la cave.

«Les pompiers nous ont offert de l’aide pour évacuer l’eau et nous ont suggéré de quitter les lieux. Nous avons cependant décidé de rester sur place», signale M. Trahan.

Le site a finalement été déclaré zone sinistrée et le couple Léveillée-Trahan a soumis une demande d’aide financière au ministère de la Sécurité publique.

«Le ministère nous a offert quatre options: réfection du bâtiment existant, immunisation de la maison (hausse des fondations, ajout d’une membrane imperméabilisante, d’un remblai protecteur et d’un puits de captation des eaux), relocalisation de la maison existante à 100 pieds de la rivière ou construction d’une nouvelle maison à la même distance du rivage», résume M. Trahan.

Les propriétaires ont évalué leurs options et choisi de reconstruire la maison. Le comité consultatif d’urbanisme (CCU) de la municipalité de Frelighsburg a reçu copie des plans et recommandé au conseil municipal de donner suite à la demande de permis. Les élus ont donné leur accord le 5 mai dernier par voie de résolution.

Le nouvel inspecteur municipal de Frelighsburg a par la suite informé les propriétaires qu’il leur serait impossible d’effectuer les réparations envisagées ou de reconstruire la maison sur le site d’origine, car le remblai protecteur exigé par la municipalité empièterait sur la bande riveraine d’une largeur de dix mètres.

Pour contourner le problème, le couple Léveillée-Trahan a soumis à la municipalité, au début de septembre, une demande de dérogation mineure dans l’espoir d’obtenir un permis pour la construction d’une nouvelle maison à 100 pieds de la rivière. À la mi-novembre, les propriétaires ont rencontré les élus et leur ont présenté les quatre options offertes par le ministère de la Sécurité publique.

Le conseil municipal a finalement rejeté la demande des requérants, lors de l’assemblée régulière du 1er décembre dernier, en affirmant que le projet n’est pas conforme à l’ensemble des règlements en vigueur, que la totalité du terrain est située dans une zone à risque de crues et que la municipalité a le devoir de protéger ses citoyens en matière de sécurité publique.

En désespoir de cause, Isabelle Léveillée et Marcel Trahan ont demandé à leur avocat de communiquer avec l’aviseur légal de la municipalité.

«Lors de la séance publique du 12 janvier, le maire a dit que le processus judiciaire était enclenché, mais je tiens à préciser que nous n’avons jamais porté plainte formellement. Nous souhaitons toujours un règlement hors cour», affirme M. Trahan.

Les propriétaires laissent entendre qu’une bataille devant les tribunaux risquerait de coûter cher à tout le monde. Selon eux, les frais pourraient s’élever à près de 50 000 $ pour chacune des parties.

«Il serait dommage que les contribuables aient à payer pour ça. Il y a sans doute possibilité d’en arriver à une entente sans aller devant un juge», insiste M. Trahan.

Ce dernier comprend mal la position du conseil dans cette affaire…

«Si la municipalité avait donné suite à notre demande de dérogation mineure, elle n’aurait pas eu à assumer de frais légaux et aurait même touché des taxes supplémentaires à la suite des améliorations apportées à la propriété. C’est à n’y rien comprendre», affirme le propriétaire.

En se basant sur des documents obtenus en vertu de la Loi d’accès à l’information, le couple Léveillée-Trahan soutient par ailleurs que le propriétaire d’origine n’aurait pas respecté les termes de la demande de permis de construction présentée en 1994 (la maison a été construite à 40 pieds de la rivière au lieu des 100 pieds exigés au permis). Il ajoute que la maison aurait dû être construite sur remblai, ce qui n’a pas été le cas. En 2007, la municipalité aurait par ailleurs accordé un permis d’agrandissement au propriétaire de l’époque, malgré un avis contraire du CCU.

«Si les règlements municipaux avaient été respectés dès le départ, la maison n’aurait jamais été inondée et nous n’en serions pas là aujourd’hui», soutiennent les propriétaires actuels.

<I>JournalLeGuide.com<I> a contacté le maire de Frelighsburg, Jacques Ducharme, pour connaître sa version des faits. Ce dernier préfère ne pas commenter l’affaire et dit vouloir attendre les recommandations de l’aviseur légal de la municipalité avant de se prononcer sur le dossier en litige.