Projet pilote à Morses Line

L’Agence des services frontaliers du Canada mènera une expérience pilote de cinq ans au poste douanier de Saint-Armand. Cette mesure, qui doit entrer en vigueur en avril 2015, permettra aux citoyens de traverser la frontière en dehors des heures normales d’ouverture grâce à l’implantation d’un système de télésurveillance.

Durant toute la durée du projet, les voyageurs arrivant au point d’entrée de Morses Line après les heures de travail des douaniers seront pris en charge dès leur arrivée à la guérite par un centre de traitement à distance.

Le système permettra une interaction audio bidirectionnelle et une interaction vidéo unidirectionnelle. L’agent des services correctionnels, basé à l’extérieur de la MRC de Brome-Missisquoi, plus précisément à Milton en Ontario, pourra voir le voyageur et son véhicule grâce à un jeu de caméras sophistiquées. L’agent et le voyageur pourront également converser au moyen d’un micro intégré à la guérite.

«Le système de traitement à distance facilitera la circulation des personnes en règle, tout en garantissant le maintien de normes de sécurité élevées», a indiqué le ministre Maxime Bernier, au nom du ministre de la Sécurité publique Vic Toews, lors d’un point de presse à Montréal.

L’Agence signale que le poste douanier de Saint-Armand a été choisi pour les fins du projet pilote en raison du nombre peu élevé de voyageurs et de véhicules commerciaux qui s’y présentent chaque jour. Un projet similaire sera mené dans la petite localité de Piney, au Manitoba.

Le service de contrôle à distance ne sera accessible qu’aux citoyens et résidents permanents canadiens et américains. Les visiteurs étrangers et les personnes dont le dossier n’est pas en règle devront se présenter au poste douanier en opération le plus près (à Philipsburg dans le cas présent).

Le maire Pelletier enthousiaste

Le maire de Saint-Armand, Réal Pelletier, accueille cette nouvelle avec enthousiasme et laisse entendre que la région de Brome-Missisquoi sait maintenant à quoi s’en tenir.

«Depuis les première coupures, on était dans le doute. On est maintenant assuré qu’il n’y aura pas de fermeture de la douane au cours des sept prochaines années», signale celui qui fait campagne contre  la réduction des heures d’ouverture au poste de Morses Line depuis le printemps 2011.

Ce dernier estime qu’il s’agit d’un bon compromis qui permettra au gouvernement Harper d’accroître les services à la population tout en composant avec les contraintes budgétaires auxquelles il doit faire face.

«Le projet pilote va permettre de prolonger les heures d’ouverture et peut-être même d’offrir le service sur une base de 24/24 heures, 7/7 jours. C’est très prometteur», ajoute le principal intéressé.

M.Pelletier estime que l’Agence n’aura pas trop de deux ans pour fignoler son projet de 16 M $.

«Il va falloir trouver la bonne technologie et évaluer l’impact de cette mesure sur la vie privée des gens (l’image des voyageurs sera captée sur vidéo) et sa conformité à la charte des droits et libertés», précise-t-il.

Le maire de Saint-Armand croit par ailleurs à l’efficacité d’un système de contrôle à distance.

«Si on est capable d’envoyer un satellite sur Mars et d’aller jeter un coup d’œil dans les veines d’une personne avec une caméra miniature, on doit sûrement avoir les moyens techniques pour vérifier à distance le contenu d’un véhicule», affirme-t-il.

Réserves du député Jacob

Le député fédéral Pierre Jacob est beaucoup plus critique à l’endroit du projet pilote et entretient plusieurs doutes quant à l’efficacité du système proposé.

«C’est une victoire partielle pour le NPD, qui se bat contre les coupures de service aux postes frontières depuis deux ans. Notre parti a interpellé le gouvernement Harper à ce sujet à plusieurs reprises en 2011 et 2012 et entend rester vigilant», indique M.Jacob.

Ce dernier estime que le Parti conservateur n’a jamais évalué l’impact de la réduction des heures d’ouverture au poste de Morses Line sur l’économie régionale et les relations de bon voisinage entre les Américains et les Canadiens.

«Les coûts d’une telle mesure sont beaucoup plus élevés que les gains réalisés par le gouvernement. Le gouvernement met en danger la sécurité des citoyens pour des économies de bouts de chandelle», poursuit le député de Brome-Missisquoi.

M.Jacob doute de l’efficacité de la télésurveillance et dit craindre des pertes d’emplois partout au pays.

«Les caméras ne permettent pas de voir à travers la tôle ou dans les pensées des automobilistes. Il n’y a rien pour remplacer le jugement d’un être humain», plaide le député néodémocrate.

Pierre Jacob reproche par ailleurs au gouvernement Harper de jouer la carte électoraliste.

«Ne trouvez-vous pas curieux que le projet pilote débute en avril 2015, soit quelques mois avant les prochaines élections fédérales, prévues pour l’automne de la même année?», demande-t-il.