Le MAMOT sermonne la municipalité de Saint-Armand

LACUNES – Le processus suivi par la municipalité de Saint-Armand pour l’attribution de certains contrats entre janvier 2009 et juin 2012 «présente des lacunes quant au respect des  dispositions législatives prévues au Code municipal du Québec» soutient le service de vérification du MAMOT dans un rapport déposé le 27 juin dernier et dont lAvenirEtDesRivieres.com  a obtenu copie.

À la suite d’une enquête menée par son service de vérification et sur la base des opinions formulées par la Direction des affaires juridiques, la Direction générale des finances municipales a émis des recommandations pour corriger la situation et entend suivre l’administration Pelletier pendant trois ans afin de s’assurer que les correctifs réclamés seront bel et bien apportés.

«La première fois, le MAMOT nous avait demandé de lui fournir certains documents afin de valider la plainte d’un citoyen. Cette fois-ci, des inspecteurs se sont déplacés chez nous pour effectuer des vérifications», précise le maire de Saint-Armand, Réal Pelletier.

Contrats de gré à gré

La vérification a permis de constater que Saint-Armand a conclu, de gré à gré, des contrats comportant une dépense d’au moins 25 000 $ et de moins de 100 000 $.

«Même si la municipalité a pu estimer en début d’année 2009 que ses besoins en agrégats et en utilisation d’équipements mécaniques pour la réfection de ses chemins n’occasionneraient pas une dépense dépassant le seuil de 25 000 $, rien ne justifie qu’elle ait, en cours d’année, conclu un contrat d’une valeur de 40 447 $ sans procéder au préalable à une demande de soumissions par voie d’invitation écrite», indique l’analyste-vérificateur, Saïd El Hour.

Le maire Pelletier soutient que la municipalité ne dépensait jamais plus de 25 000 $ pour l’achat d’abrasif jusqu’à tout récemment. «Depuis deux ans, ça dépasse le seuil de 25 000 $ et on y va par invitation», précise-t-il.

Ce dernier ajoute que la municipalité avait coutume de demander des soumissions une fois par année pour son approvisionnement en agrégats en demandant un prix basé sur le tonnage. «Au lieu d’y aller à la tonne, on y va maintenant sur invitation pour chaque segment de route», résume le maire.

M. Pelletier ajoute que les dépenses sans demande de soumissions de 2011 ont été engagées au lendemain des inondations historiques dans le cadre du déploiement des mesures d’urgence.  L’adoption d’un décret gouvernemental, rappelle-t-il, autorisait la municipalité à ériger une digue sur l’avenue Champlain, aux abords de la baie Missisquoi, sans demande de soumissions. Tout a été réalisé en moins de 24 heures.

Subdivision de contrats

Le rapport d’enquête indique que Saint-Armand n’a pas respecté les dispositions du Code municipal ayant trait à la division de contrats en plusieurs sous-contrats. On fait ici référence aux mandats accordés à une firme spécialisée pour la réalisation d’une étude de faisabilité sur la stabilisation des berges du lac Champlain (paiements de 24 833 $ en 2009 et de 6 454  $ en 2010 qui portent le montant total du projet à 31 287 $).

«Une planification des besoins (…) aurait permis à la municipalité d’évaluer le coût des services professionnels et de conclure que les dépenses dépasseraient le seuil de 25 000 $», indique M. El Hour, dans son rapport.

Réal Pelletier rétorque que le deuxième mandat avait pour but de recueillir de nouvelles données à la suite de la modification des berges attribuable aux inondations historiques de 2011. «Un conseiller juridique du MAMOT m’a rappelé pour me dire que la demande d’exemption que j’avais soumise au ministre ne fonctionnerait pas, mais la dépense était déjà engagée», explique le maire.

Délégation de pouvoirs

L’analyste-vérificateur signale que la municipalité n’a pas respecté son règlement en matière de délégation du pouvoir d’autoriser des dépenses. Selon le document, des contrats verbaux ont été attribués par un fonctionnaire de la municipalité, sans résolution du conseil. De plus, plusieurs factures dépassent le seul de 500 $ en-deça duquel les employés cadres de la municipalité étaient autorisés à dépenser.

«Plus d’une centaine de contrats verbaux d’une valeur de plus de 500 $ chacun et totalisant 1 070 159 $ n’ont pas fait l’objet d’une résolution du conseil», résume M. Saïd El Hour, analyste-vérificateur au MAMOT.

Après discussions avec les gens du MAMOT, l’administration Pelletier a choisi d’ajuster la marge de manœuvre de ses fonctionnaires afin de mieux tenir compte des coûts actuels des biens et services.

«Notre règlement datait de 1 000 ans et avait besoin d’être mis à jour», lance Réal Pelletier, de façon imagée. «Les ajustements apportés ont permis d’augmenter le pouvoir de dépenser du chef pompier à 1 000 $, celui de la directrice générale à 2 500 $ et celui de l’inspecteur municipal à 5 000 $. De plus, rien n’est payé sans que ça passe par le conseil.»

M.Pelletier laisse entendre que la municipalité n’entend pas déroger à son règlement, mais pourrait être tenu de le faire en cas de situation exceptionnelle.

«Si la pépine saute et que ça prend une transmission, je ne pourrai pas attendre la tenue d’une réunion du conseil avant d’agir. Je prendrai alors soin d’appeler les autres conseillers afin qu’ils autorisent la dépense», poursuit-il.

Autres irrégularités

Le MAMOT a relevé d’autres irrégularités administratives à Saint-Armand et formulé des recommandations pour y remédier.

L’analyste-vérificateur signale que la municipalité a procédé à l’ouverture de soumissions sans la présence de témoins et a omis de remettre certains documents aux entreprises soumissionnaires.

Le maire Pelletier soutient que les ouvertures de soumissions ont bel et bien eu lieu en présence de témoins, mais ajoute que, dans un cas, la directrice générale a tout simplement oublié de faire signer les témoins.

«La directrice générale ne remettait pas la feuille de procédure de façon systématique aux contracteurs qui l’avaient déjà reçue. On suit maintenant les consignes à la lettre », explique M. Pelletier.