Un bloc de glace passe près de tuer une adolescente

Alexia Richer, une jeune conductrice de 17 ans a eu la peur de sa vie, vendredi dernier, sur la route 235, à Ange-Gardien. Un énorme morceau de glace, détaché d’un poids lourd, a défoncé son pare-brise, passant à quelques centimètres de sa tête, avant d’éclater dans l’habitacle de son véhicule.

 

La Farnhamienne se rendait à son travail lorsqu’elle a croisé un camion semi-remorque sur la route 235, près du passage à niveau. «J’ai vu le bloc de glace s’en venir. J’ai lâché le gaz, j’ai fermé les yeux, je me suis penchée et j’ai mis mes mains sur ma tête», raconte l’adolescente. Dans un bruit d’enfer, le bloc de glace a fracassé son pare-brise. «Il s’est ramassé à l’arrière de mon auto, tout éparpillé», poursuit-elle.

 

Sous le choc et paniquée, la jeune conductrice s’est garée en bordure de la route et a appelé sa mère. «Elle pleurait, elle n’était pas calmable. Quand elle m’a dit ce qui s’était produit, je pensais que le pare-brise était craqué. Je lui ai dit d’aller à son travail», explique Katrina Couture, la mère d’Alexia. La jeune fille l’a écouté. «J’ai repris la route. Je pleurais et les gens me regardaient bizarrement», raconte Alexia qui s’est rendu à son travail, au A&W, situé près de la sortie 55 de l’autoroute 10.

 

«Après qu’elle ait appelé, on est parti. Quand j’ai vu la voiture, j’ai imaginé le pire. J’étais soulagée de voir qu’elle était correcte», poursuit Mme Couture.

 

«Elle aurait pu se faire tuer. On ne s’attendait pas à ça. On est resté surpris», ajoute le beau-père d’Alexia, Jacques Veilleux.

 

La jeune fille s’en tire avec une bonne frousse, une coupure superficielle à la tête, quelques égratignures aux mains et des courbatures. «J’ai été très chanceuse», prend conscience Alexia.

 

Cette dernière raconte que ce n’est pas le premier épisode du genre qu’elle vit. «L’autre fois, un gros bloc de neige a atterri sur ma voiture. Je n’ai eu qu’à partir mes essuie-glaces.»

 

Ne croyant pas être assurée pour les dommages que venait de subir sa voiture, la jeune fille a tenu à faire son quart de travail. «Ma patronne voulait que je retourne chez moi. Je me disais que je n’avais pas le choix de travailler. J’avais besoin de cet argent-là. J’ai enlevé les éclats de vitre et j’ai fait mon quart, mais ç’a été difficile de travailler. Je me posais beaucoup de questions, ça n’a pas été une belle soirée.»

 

«Ça aurait pu être pire»
Conscients de la chance qu’a eue Alexia, les deux parents lancent un appel à la vigilance aux camionneurs. «Le but, ce n’est pas de trouver le coupable, c’est de sensibiliser les chauffeurs de camion. Ils doivent déglacer leur toit», dit Jacques Veilleux.

 

«Ça aurait pu être plus dramatique. Si Alexia n’avait pas eu le réflexe de se pencher, si elle avait eu un moment d’inattention, elle aurait pu être défigurée ou être morte», enchaîne la mère de famille.

 

Les deux parents croient que le camionneur, qui a pris la poudre d’escampette, a été négligent. «Ça fait des années qu’on répète aux chauffeurs de déglacer leur camion. C’est un manque de la part du conducteur», soutient Mme Couture.

 

Le lieutenant Marc-André Laporte, adjoint de poste par intérim à la Sûreté du Québec de la MRC de Rouville, ne cache pas qu’il est quasi-impossible de retrouver le camion et son conducteur. «Les camionneurs peuvent accrocher du monde sans le sentir», dit-il.

 

Dans le cas où le fautif aurait été pris en flagrant délit, l’article 498 du Code de la sécurité routière, spécifiant qu’«il est interdit à tout conducteur de laisser une matière quelconque se détacher du véhicule qu’il conduit» pourrait être appliqué. Le policier précise que la contravention s’élève à 60$ plus les frais.

 

Conduite dangereuse
Y-a-t-il eu négligence criminelle de la part du camionneur? «Il faut que ça cause des lésions corporelles ou que ce soit mortel pour être considéré de la sorte», explique Simon Roy, professeur agrégé en droit pénal à l’Université de Sherbrooke.

 

Ce dernier explique qu’une accusation de conduite dangereuse simple s’appliquerait davantage à ce cas précis. «Ce n’est pas un crime très grave. La peine d’emprisonnement maximale est de cinq ans. Il faudrait se poser la question suivante : est-ce que le bloc de glace résulte du défaut de déblayer le camion? Si tel est le cas, est-ce que le défaut de le faire est négligent au point d’être criminel», poursuit M. Roy.

 

Selon le spécialiste en droit pénal, la Couronne pourrait avancer l’argument que les camionneurs inspectent quotidiennement leur camion avant de prendre la route. «S’il s’aperçoit que sur le camion, il y a un bloc de glace substantiel, ça crée un danger parce qu’on a aucune idée quand le bloc de glace va partir. Et ça dépend aussi de la grosseur du bloc de glace. Honnêtement, c’est le genre de dossier où habituellement il n’y a pas de poursuites criminelles», conclut le professeur Roy.