Venise-en-Québec met sur pause les nouvelles constructions jusqu’à nouvel ordre

MUNICIPAL. Aux prises avec un débit d’eaux usées théorique qui dépasse la capacité de traitement de son usine d’épuration, la Municipalité de Venise-en-Québec a adopté, lundi dernier, un règlement de contrôle intérimaire ayant pour effet d’interdire toute nouvelle construction dans les limites de son territoire jusqu’à nouvel ordre.

«Le conseil municipal ne veut pas alarmer la population outre mesure et ne veut pas non plus arrêter le développement plus longtemps que nécessaire. Il ne sera pas possible d’augmenter la capacité de traitement des infrastructures existantes du jour au lendemain, mais tous les efforts seront déployés pour trouver une solution aux problèmes dans les plus brefs délais. Si tout va bien, la Municipalité devrait être en mesure d’accorder de nouveaux permis de façon graduelle dès que des correctifs significatifs auront été apportés au réseau d’égout existant», résume le maire, Raymond Paquette.

Ce dernier n’est pas sans savoir que la décision du conseil de geler l’émission des permis –  pour les nouvelles constructions et les agrandissement impliquant l’ajout de nouveaux logements – peut faire des mécontents.

«Les promoteurs ne sont pas contents, mais ils comprennent la situation», ajoute M. Paquette, qui dit en avoir discuté avec une demi-douzaine d’entre eux.

La Municipalité de Clarenceville, dont les eaux usées sont traitées à l’usine d’épuration de Venise-en-Québec, accepte de prendre des engagements similaires.

«Les douze projets de construction de maisons unifamiliales pour lesquels des permis ont déjà été émis pourront être réalisés comme prévu, mais la Municipalité n’émettra pas d’autre permis jusqu’à nouvel ordre», signale le maire, Serge Beaudoin.

Près de 30 % du volume d’eaux usées traité à l’usine de Venise-en-Québec provient de cette localité.

Afin de garantir le respect du règlement de contrôle intérimaire, la Municipalité prévoit des amendes pour les contrevenants (1000 $ et 2000 $ pour une première et une deuxième infraction citoyenne / 2000 $ et 4000 $ pour une personne morale).

Hausse de la population

Venise-en-Québec entend modifier son plan d’urbanisme, adopté en 2008, afin de mieux encadrer la planification de certaines secteurs résidentiels et de tenir compte de la capacité des réseaux d’infrastructures et des équipements municipaux.

«Avant la pandémie, le développement était relativement bien planifié. La COVID est cependant venue bousculer les habitudes. Plusieurs citoyens ont décidé de quitter les grandes villes pour s’établir dans des localités plus petites. La popularité du télétravail et l’ouverture des employeurs envers ce mode de travail ont contribué à cet exode», explique le maire Paquette.

Plusieurs nouvelles constructions ont vu le jour sur le territoire de Venise-en-Québec au cours des deux dernières années. La population est passée de 1704 habitants en 2019 à 1923 en 2021, en hausse de 12,8 %.

«Pas moins de 71 portes sont venues grossir le parc immobilier de Venise en 2020 et ce nombre est passé à 139  en 2021. Les projections pour 2022 allaient dans le même sens (46 nouvelles portes autorisées en date du 12 avril), de sorte qu’on pouvait s’attendre à franchir le cap de 160 portes durant l’année en cours si rien n’était fait», résume M. Chevrette.

Ce dernier explique que la hausse de la population exerce «une pression énorme» sur certaines infrastructures municipales qui n’ont pas été conçues pour un développement urbain aussi dense.

L’usine d’épuration a une capacité de traitement théorique de 1293 mètre cubes par jour (m3/j) alors que la projection du débit quotidien moyen pour 2022 – basée sur les permis de construction émis en 2021 pour des bâtiments devant être occupés en 2022 et sur les permis émis entre le 1er janvier et le 12 avril de cette année – s’élève à 1804 m3/j. Sur la base de ces données, l’excédent quotidien moyen se chiffre à 511 m3/j.

«En période de pointe, au moment de la fonte des neiges, l’usine a dû traiter jusqu’à 2479 m3/j en 2021 et 4000 m3/j en 2022», joute M. Chevrette.

Solutions à long terme

Le directeur des services techniques laisse entendre que la Municipalité n’aura pas d’autre choix que de procéder à la mise à niveau de son usine d’épuration, en opération depuis 1994, pour faire face à la nouvelle demande. Elle devra également grossir les postes de pompage et certaines conduites d’égout.

«Le cas de Venise n’a rien d’unique. Certaines municipalités de la Montérégie font face au même problème et ont choisi d’interdire – en tout ou en partie –

les nouvelles constructions sur leur territoire jusqu’à nouvel ordre», indique M. Chevrette.

Le maire prend soin de préciser que les autorités municipales travaillent déjà sur le dossier en collaboration avec la firme Tetra Tech. Il ajoute que certains correctifs pourraient être apportés immédiatement alors que d’autres devront attendre un peu en raison de leur coût élevé.

Au chapitre options à court terme, la Municipalité entend notamment vérifier s’il y a des infiltrations dans le réseau en provenance du lac. Elle compte par ailleurs assurer une surveillance accrue afin de s’assurer que les pompes d’assèchement (sump pump) des citoyens et des entreprises ne sont pas raccordées au réseau d’égout municipal.

Cette tâche incombe actuellement aux employés municipaux, mais le conseil prévoit confier le travail à une firme privée dans les plus brefs délais.

Un citoyen qui contrevient au règlement municipal en cette matière s’expose à une amende de 100 $ et plus pour une première offense et de 200 $ et plus pour une seconde offense. Le montant des contraventions est encore plus élevé pour les personnes morales.

«L’eau de pluie et l’eau souterraine ne nécessitent pas de traitement et leur présence dans le réseau d’égout vient surcharger l’usine d’épuration sans raison valable», explique M. Chevrette.