Brome-Missisquoi aux prises avec une pénurie de cuisiniers

RESTAURATION. Le secteur de la restauration doit composer avec une importante pénurie de main-d’oeuvre. Le problème est particulièrement criant dans Brome-Missisquoi et dans certaines autres régions du Québec.

«C’est un réel problème, car les cuisiniers, aides-cuisiniers et autres employés de cuisine sont difficiles à trouver, tout spécialement quand on recherche une certaine stabilité. Les gens de Montréal et des grands centres ayant de l’expérience dans ce domaine n’ont pas tous un emploi, mais ils hésitent souvent à venir à s’installer en région», signale Marie-Florence Crevier-Paradis, copropriétaire du Old Mill 1849, un bistro-pub gastronomique de Stanbridge Est.

L’entreprise a dû user d’imagination, le printemps dernier, à quelques mois de son ouverture, pour trouver du personnel. Les offres d’emploi publiées sur des sites spécialisés et les démarches auprès de l’Institut de tourisme et d’hôtellerie du Québec (ITHQ), du Campus Brome-Missisquoi  et d’Emploi-Québec n’avaient pas donné les résultats escomptés.

«En bout de ligne, ce ne sont pas les démarches officielles, mais le bouche-à-oreille qui a le mieux fonctionné», précise Mme Crevier-Paradis.

L’établissement a été chanceux malgré tout, car une dame d’expérience de retour dans la région est venue porter son CV un mois avant l’ouverture.

«Sa passion pour la cuisine et les valeurs auxquelles elle adhère en faisaient une candidate idéale», poursuit la copropriétaire du Old Mill 1849.

Un résidant de Stanbridge East dans la jeune trentaine a par ailleurs quitté son emploi en cuisine d’établissement, quelques jours plus tard, pour se joindre à l’entreprise en démarrage. Quatre autres employés de cuisine ont intégré l’équipe par la suite.

Le recrutement des employés de salle a été beaucoup plus facile, car les étudiants à la recherche d’un emploi d’été ne manquent pas dans Brome-Missisquoi.

«Ces mêmes étudiants ont accepté de continuer avec nous à temps partiel durant l’année scolaire», poursuit Mme Crevier-Paradis.

Même si son équipe est actuellement complète, cette dernière est bien consciente qu’il lui faudra recommencer tout le processus dès que l’entreprise voudra prendre de l’expansion.

«Il va falloir faire aller nos contacts au maximum», lance-t-elle.

Même problématique à Sutton

Le copropriétaire de la microbrasserie Auberge Sutton Brouërie, Patrick Roy, abonde dans le même sens

«Dès qu’on perd un cuisinier, on sait d’avance que ça va nous prendre un bon mois pour le remplacer», indique-t-il.

Dix-huit mois après son ouverture, la microbrasserie s’est retrouvée en manque de personnel et a dû se trouver de nouveaux cuisiniers.

«Nous avons été chanceux, car nous avons pu mettre la main sur le cuisinier d’un établissement qui fermait ses portes. Et même s’il est resté avec nous moins d’un an, il a eu le temps de remonter la cuisine et de former un sous-chef de 27 ans qui assure la relève», résume M. Roy.

L’établissement de Sutton a par la suite recruté un autre cuisinier d’une trentaine d’années ayant travaillé dans de bons restaurants de Montréal.

«Cela dit, il nous manque encore un cuisinier. On tente de combler le poste depuis deux ou trois semaines», précise M. Roy.

Guère mieux à Dunham

Le propriétaire de l’Épicerie-Café Dunham, Christian Gladu, rencontre lui aussi de sérieux problèmes de recrutement et doit mettre la main à la pâte plus souvent qu’à son tour.

«Je suis dans la restauration depuis 20 ans, mais je n’avais encore jamais travaillé en cuisine. À défaut de pouvoir trouver un cuisinier d’expérience, je suis aux fourneaux depuis trois ans sur une base de six ou sept jours par semaine», signale-t-il.

Ce dernier a cependant pu dénicher un cuisinier, voilà trois semaines, et pourra désormais consacrer du temps à ses autres projets.

«J’ai loué un local à Sutton en mai dernier dans l’espoir d’y ouvrir un comptoir, mais le projet est resté sur les tablettes faute de cuisinier», explique-t-il.

Le comptoir Sutton ouvrira finalement ses portes à la mi-décembre.

Pointe de l’iceberg

La rareté de main-d’oeuvre en restauration est un problème provincial qui n’est pas prêt de se résorber. L’Association des restaurateurs du Québec (ARQ) croit même que la pénurie va s’accentuer au fil des ans.

«Selon le Conférence Board du Canada, pas moins de 8 720 emplois seront vacants dans le secteur de la restauration au Québec d’ici 2020. Ce chiffre passera à 18 943 en 2035«, signale Martin Vézina, conseiller en communication et affaires publiques à l’ARQ.

«Le groupe des 15-24 ans va décroître de 9 % d’ici 2021. Or, s’il y a une industrie qui pige dans ce bassin de main-d’oeuvre, c’est bien la nôtre. En bout de ligne, tous les secteurs d’activité seront touchés tôt ou tard par la décroissance de la jeune population», affirme-t-il.