Ottawa modifie les règles pour s’assurer que le permis d’armes à feu est valide

OTTAWA — Le gouvernement libéral a finalisé sa réglementation sur les armes à feu, promise depuis longtemps, qui garantirait maintenant que l’acheteur d’une arme à feu possède véritablement un permis valide, et qui obligerait le marchand à tenir un registre de ses ventes et ses inventaires.

Les mesures annoncées mercredi par le ministre de la Sécurité publique, Marco Mendicino, constituent les dernières étapes vers la mise en œuvre complète du projet de loi C-71, qui a reçu la sanction royale en 2019.

À l’époque, le gouvernement avait déclaré qu’il obligerait les vendeurs à vérifier la validité d’un permis d’armes à feu avant de vendre une arme sans restrictions, comme une carabine ou un fusil de chasse.

Par contre, la réglementation proposée n’obligeait pas le vendeur à vérifier auprès du directeur fédéral de l’enregistrement des armes à feu si l’acheteur potentiel détenait vraiment un permis valide. Cette omission avait suscité des critiques de la part des partisans pour un contrôle des armes à feu, et la réglementation finale rendue publique mercredi vient combler cette brèche. 

À compter du 18 mai prochain, «les personnes et les entreprises qui transfèrent ou vendent une arme à feu sans restriction devront confirmer l’identité de l’acheteur et la validité de son permis (y compris le numéro du permis et d’autres informations) auprès du directeur de l’enregistrement des armes à feu», indique le ministère dans un communiqué.

De plus, les entreprises d’armes à feu seront maintenant tenues de conserver des dossiers de ventes et un inventaire des armes à feu sans restrictions, «comme c’était le cas jusqu’en 2005».

Les conservateurs ont tôt fait, mercredi, d’accuser les libéraux de relancer le registre national des armes d’épaule, créé par le gouvernement libéral en 1995 avant d’être aboli par le gouvernement conservateur de Stephen Harper en 2012.

«Justin Trudeau a dit qu’il n’adopterait jamais un registre des armes d’épaule et aujourd’hui, il rompt cette promesse faite aux Canadiens en transférant la responsabilité de tenir un registre aux détaillants qui vendent des armes à feu à des Canadiens légitimes et titulaires d’un permis en bonne et due forme», ont déclaré les conservateurs dans un communiqué.

«Différences» entre les deux régimes

Le gouvernement soutient qu’il existe des différences importantes entre le nouveau système et l’ancien registre des armes d’épaule.

Les dossiers de ventes seront conservés par les entreprises, et non par le directeur de l’enregistrement des armes à feu, a expliqué le gouvernement. En outre, la police aura besoin de motifs raisonnables, et souvent d’un mandat accordé par le tribunal, pour avoir accès à ces dossiers commerciaux.

Une exigence similaire pour la tenue des dossiers des vendeurs était en place entre 1979 et 2005.

Le ministre Mendicino a déclaré mercredi que ces mesures permettront aux forces de l’ordre d’enquêter et de retracer plus facilement les crimes commis avec des armes à feu. Il a ajouté que de nombreuses entreprises enregistrent déjà ces ventes, par diligence raisonnable.

Dans l’ensemble, le ministre a qualifié les dernières réglementations de «règles sensées et plus sûres concernant la vente et le transfert d’armes à feu».

«Ces nouvelles règles garantiront que les personnes qui ne sont pas autorisées ou ne devraient pas avoir accès à une arme à feu ne pourront pas en obtenir une, et elles empêcheront les armes de tomber entre de mauvaises mains», a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse à laquelle assistaient des militants pour le contrôle des armes à feu, qui réclament depuis longtemps d’Ottawa des dispositions plus strictes.

PolySeSouvient heureux 

Le nouveau règlement sur la vérification de la validité des permis a été salué comme une «mesure fondamentale et raisonnable» par le groupe de contrôle des armes à feu «PolySeSouvient», qui comprend des étudiantes et des diplômées de l’École polytechnique de Montréal, où un homme armé avait tué 14 femmes en 1989.

«Compte tenu de l’opposition continue du Parti conservateur au projet de loi C-71 et de ses manœuvres passées visant à saper la mise en œuvre de contrôles sur les armes à feu, nous craignions qu’un futur gouvernement conservateur ne profite d’un passage vague du règlement proposé pour faire en sorte que les demandes de transferts soient systématiquement approuvées sans que le permis ne soit réellement validé par le système, indique l’organisme dans un communiqué. L’amendement empêche effectivement un tel scénario.»

PolySeSouvient a également salué le retour des dossiers de ventes commerciales. «C’est justement en consultant les registres de ventes de plusieurs magasins d’armes à feu que les policiers de Montréal ont pu identifier le tireur du massacre à Polytechnique.»

Le projet de loi C-71 avait également élargi à toute la vie d’une personne, et pas seulement aux cinq dernières années, les vérifications des antécédents pour déterminer l’admissibilité à un permis d’armes à feu. On avait aussi élargi les motifs de refus, pour ajouter les antécédents de violence conjugale et de menaces en ligne de l’acheteur.

En outre, la loi exige que les propriétaires possèdent une autorisation de transport distincte lorsqu’ils apportent des armes à feu à autorisation restreinte et prohibées ailleurs que dans un centre de tir approuvé.