Une motion adoptée pour redresser le Québec dans ses efforts de lutte au VIH

MONTRÉAL — Admettant que le Québec a «un peu dévié de sa trajectoire» en matière de lutte contre le VIH, le député de Québec solidaire (QS) Vincent Marissal a présenté une motion conjointe qui a été adoptée à l’Assemblée nationale, vendredi, afin de reconnaître l’importance de prioriser la lutte contre le VIH et autres ITSS et la nécessité d’améliorer l’accès au dépistage et aux traitements.

En conférence de presse, M. Marissal a fait valoir que la hausse de nouveaux diagnostics de VIH est inquiétante. «Chaque année on fait un peu les mêmes constats et ces années-ci, malheureusement, on fait un constat assez grave que la situation ne s’améliore pas, au contraire, on détecte de plus en plus de cas», a déclaré le porte-parole en santé de QS.

La motion fait état d’une augmentation de 37 % des cas entre 2019 et 2022 et que la tendance à la hausse se confirme dans les estimations de 2023.

Selon la Coalition des organismes communautaires québécois de lutte contre le sida (COCQ-SIDA), 422 nouveaux diagnostics de VIH ont été enregistrés en 2022 contre 246 en 2021. Cela représente une hausse de 72 %. De ce nombre, 78 % des nouveaux cas de VIH trouvés étaient leur premier dépistage.

«La pandémie a eu des impacts sur l’accès au dépistage. On commence tout juste à en voir les impacts. On ne peut pas se permettre que la prochaine urgence sanitaire vienne annuler les activités de dépistage pour la population, plus particulièrement pour les personnes en situation de vulnérabilité ou qui sont plus éloignées du système de santé», a soutenu Hélène Hébert, directrice générale de l’organisme Miels Québec.

«On était sur la bonne trajectoire, on a dévié un peu, on le reconnaît, on corrige cette trajectoire. On doit, on peut faire beaucoup mieux, on a le devoir de faire beaucoup mieux au Québec. (…) Je donnerai suite assurément pour nous assurer qu’on soit capable de rependre le rôle qu’on avait de leader en matière de lutte VIH/sida», a promis M. Marissal.

Le ministre de la Santé, Christian Dubé, a dit en Chambre qu’il ne fallait pas nier le fait qu’il y a une hausse des cas d’infections qui sont transmises sexuellement. «On pensait que c’était en régression. Et c’est comme un autre virus, ça couve souvent en dessous, et, malheureusement, on a peut-être un peu baissé les bras», a-t-il reconnu.

La motion salue également «la volonté du gouvernement d’améliorer l’offre de dépistage et d’évaluer la possibilité de permettre le dépistage rapide par les intervenants et intervenantes communautaires». Les élus ont par ailleurs observé une minute de silence à la mémoire des victimes du sida.

Des barrières au dépistage et aux soins

Valérie Samson, directrice générale de Réplique Estrie, un organisme qui soutient les personnes vivant avec le VIH/sida et l’hépatite C, a parlé en conférence de presse des obstacles à l’accès au dépistage, mais aussi aux traitements.

Mme Samson soutient qu’il n’y a pas assez d’offres de dépistage sur l’ensemble du territoire québécois. «Sans dépistage, la transmission est évidemment très présente. C’est ce qu’on veut éviter le plus possible», dit-elle.

La directrice a attiré l’attention sur le manque de diversité de points de services. Au Québec, les gens peuvent se rendre à une des cliniques de dépistage, qui sont surtout situées dans les grands centres, ou encore se présenter à un CLSC, à certains Groupes de médecine familiale (GMF) ou demander un test à leur médecin de famille.

«Quand on cherche à avoir un dépistage, parfois, on ne sait pas sur quelle porte cogner ou de quelle façon pouvoir l’avoir. Il y a des endroits précis, mais ils sont souvent méconnus de la population», explique Mme Samson.

Elle a aussi soulevé l’enjeu du manque de personnel. «On comprend que la prévention, à certains moments, n’est pas toujours la priorité et qu’il y a d’autres urgences qui sont très importantes. Mais si on ne met pas de l’avant la prévention comme le dépistage et si on ne met pas des infirmières en remplacement quand elles sont en congé ou en congé de maternité, par exemple, ça fait vraiment un trou de services», déplore Mme Samson.

Elle a également mentionné que l’accès aux soins «n’est pas aussi simple qu’on peut le penser». Comme la plupart des infectiologues se trouvent dans les grands centres urbains, il y a des enjeux de mobilité pour certains patients en région, dit-elle.

Solutions proposées

La COCQ-SIDA et ses organismes partenaires ont adressé plusieurs revendications aux élus pour qu’ils améliorent la situation au Québec. Ils revendiquent notamment la gratuité pour les traitements du VIH et le PrEP, qui est un traitement préventif, ainsi que la prophylaxie post-exposition.

Les organismes de lutte contre le VIH/sida souhaitent également que le gouvernement mène des campagnes de masse de dépistage de la même façon que cela se fait pour certaines campagnes de vaccination. Dans le même ordre d’idées, ils proposent d’organiser des campagnes d’informations et de sensibilisation destinées à la population générale.

Afin de contrer un manque d’informations et une stigmatisation existante auprès de professionnels de la santé, les organismes suggèrent de mettre en place des formations pour le personnel médical pour promouvoir les bonnes pratiques en lien avec les ITSS.

Parmi les autres solutions mises de l’avant, on encourage Québec à bonifier l’accès au dépistage en dehors du réseau de la santé, ce qui permettrait de rejoindre des clientèles qui sont réticentes à fréquente le réseau traditionnel de santé.

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