Secteur public: le front commun et la FIQ invitent LeBel à éviter le «chantage»

MONTRÉAL — L’invitation faite par la ministre Sonia LeBel aux syndicats du secteur public de réduire le nombre de leurs demandes, en y liant le maintien de certaines primes, est perçue par ceux-ci comme une forme de «chantage».

En entrevue, la présidente du Conseil du trésor, Sonia LeBel, s’est engagée à réduire à cinq le nombre de ses demandes et a invité l’ensemble des syndicats des secteurs public et parapublic à faire de même avec leurs demandes sectorielles.

Ces demandes sont celles qui touchent les conditions de travail dans les secteurs comme la santé et l’éducation.

Si les syndicats s’engagent ainsi, elle promet de maintenir les primes que touchent des milliers de travailleurs jusqu’en décembre, le temps de finaliser le reste de la négociation des conventions collectives.

«C’est une forme de chantage et de menaces», a estimé en entrevue Jérôme Rousseau, vice-président de la Fédération interprofessionnelle de la santé et coresponsable de la négociation pour la FIQ.

Plusieurs de ces primes devaient prendre fin le 31 mars et ont déjà été prolongées à deux occasions par Québec. Elles devaient prendre fin le 30 septembre, mais lundi, Québec en a annoncé le maintien jusqu’à la mi-octobre. Ces primes totalisent 600 millions $, a précisé la ministre.

Ces primes concernent le personnel infirmier, les psychologues, les ouvriers spécialisés, les secrétaires médicales, par exemple. Elles peuvent représenter des milliers de dollars pour les travailleurs concernés.

Dans le cas des primes versées au personnel infirmier, il s’agit de trois primes, de soir, de nuit et de jour. M. Rousseau rappelle qu’il y a présentement un exode des infirmières vers le privé et que le fait de leur retirer une prime n’est certes pas une façon de les retenir dans le réseau public.

Le front commun, qui est constitué de la CSQ, de la CSN, de l’APTS et de la FTQ, voit aussi une forme de «chantage» dans le lien que fait la ministre LeBel entre le maintien des primes et la réduction du nombre de demandes syndicales.

Le président de la CSQ, Éric Gingras, a donné l’exemple de la prime versée aux ouvriers spécialisés qui travaillent dans les écoles. Il s’agit d’une prime dite «d’attraction-rétention», donc qui sert à attirer du personnel dans des métiers plus difficiles à pourvoir.

«Un plombier, pour ne pas qu’il aille dans les municipalités, par exemple, et qu’il choisisse le secteur scolaire, on donne une prime. Qu’il la perde demain, c’est un gros changement. Ce qu’on dit, c’est ‘gardez-les; on va continuer à discuter’. Mais elle mélange les deux. Elle veut élaguer? Pour nous, c’est deux choses. Mais là, elle les met ensemble. Donc oui, c’est une forme de chantage. Et on pense que notre personnel qui travaille au quotidien mérite mieux que ça», a répliqué M. Gingras.

Le front commun prend note du fait que le Conseil du trésor veut donner l’exemple en réduisant lui-même le nombre de ses demandes patronales. «Elle nous a dit ‘je vais le faire pour vous montrer ma bonne volonté, pour vous montrer que je suis sérieuse’. On la prend au mot», a répliqué M. Gingras.

«Montrez-nous votre volonté; nous on va regarder ça. Et après ça, nous on fera les mouvements qui seront nécessaires en fonction de ce que vous nous présenterez», a résumé le président de la CSQ.

Quant à la FIQ, elle devait déjà réunir une de ses instances, la semaine prochaine, et cette demande du Conseil du trésor sera alors discutée, a précisé M. Rousseau.