Voie maritime: 2e jour de grève; requête de l’employeur pour exempter les céréales

MONTRÉAL — Les quelque 360 syndiqués d’Unifor qui travaillent à la voie maritime du Saint-Laurent en étaient à leur deuxième journée de grève, lundi, alors que l’employeur tente d’obtenir une exception à la grève pour le transport de céréales.

Le trafic maritime dans le corridor qui relie Montréal à Niagara, en passant par les écluses, est ainsi paralysé depuis dimanche à 00h01. Il s’agit d’un corridor stratégique qu’empruntent 4000 navires annuellement.

Les membres des sections locales concernées d’Unifor au Québec et en Ontario s’étaient prononcés à 99 % en faveur de la grève.

L’employeur, la Corporation de gestion de la voie maritime du Saint-Laurent, demande au Conseil canadien des relations industrielles — l’équivalent du tribunal du travail pour la juridiction fédérale — d’obtenir une exemption pour le transport de céréales.

Il invoque ainsi un article peu connu du Code canadien du travail, qui stipule que pendant une grève ou un lock-out, un employeur du secteur du débardage ou d’un autre secteur d’activités visé et leurs employés «sont tenus de maintenir leurs activités liées à l’amarrage et à l’appareillage des navires céréaliers aux installations terminales ou de transbordement agréées, ainsi qu’à leur chargement, et à leur entrée dans un port et leur sortie d’un port».

Le grand syndicat Unifor, qui est affilié à la FTQ au Québec, fait valoir que cet article du Code canadien du travail fait référence à un port, aux installations terminales ou de transbordement, mais pas aux canaux et aux écluses comme la voie maritime du Saint-Laurent.

La requête de la Corporation de gestion n’a pas été entendue encore par le Conseil canadien des relations industrielles. Contacté pour savoir s’il allait procéder à l’audition de la requête et, si oui, à quel moment, le Conseil n’avait pas encore répondu, au moment d’écrire ces lignes.

Les salaires sont le principal point en litige. Unifor fait valoir que ses membres sont frappés de plein fouet par l’inflation et que puisque leur travail a une importance stratégique pour l’économie canadienne, celle-ci doit être reconnue en conséquence.

Camionnage et milieu des affaires

Entre-temps, le milieu des affaires commence à s’inquiéter, vu l’importance stratégique de ce corridor de commerce pour tout le pays.

«Ce conflit de travail va fortement affecter nos entreprises. Il s’agit d’une autre interruption au cœur de la chaîne d’approvisionnement et c’est l’ensemble des manufacturiers du Québec qui est encore une fois pris en otage. La voie maritime est l’artère économique principale du Québec et de l’Est du Canada. Nous encourageons les parties impliquées à négocier une entente dans les plus brefs délais afin de mettre fin à cette situation», a commenté la présidente-directrice générale de Manufacturiers et exportateurs du Québec, Véronique Proulx.

À l’Association du camionnage du Québec, le président-directeur général Marc Cadieux rapporte que son industrie ne sera pas immédiatement sollicitée pour pallier à l’interruption du transport maritime, mais ce n’est peut-être qu’une question de temps.

«Le mal de tête le plus imminent, pour l’instant, c’est les entreprises maritimes qui doivent bien sûr trouver d’autres moyens pour faire parvenir les marchandises via d’autres façons de le faire», a-t-il indiqué.

Mais «il pourrait y avoir aussi dans le secteur manufacturier des usines ou des modes de transformation qui vont manquer de matières premières. Donc, nous pourrions ne pas être appelés parce qu’il n’y a rien à transporter et, soudainement, tous être appelés du même coup, lorsque les produits seront prêts à se rendre vers les acheteurs, vers la consommation», a illustré M. Cadieux.

Et il prévient que cette manutention supplémentaire et cette redirection de la marchandise entraîneront nécessairement une augmentation des coûts. «Il y a toujours des coûts attachés à ça. Et ces coûts-là ont un effet domino vers le produit, vers la consommation. Ça, c’est inévitable», a conclu M. Cadieux.