Brome-Missisquoi, un terreau fertile pour l’agrosylviculture riveraine

AGROFORESTERIE – La Coopérative de solidarité du bassin versant de la rivière aux Brochets (CSBVRB), dissoute le printemps dernier, laisse un héritage tangible aux générations futures comme ont pu le constater divers représentants du MAPAQ en visite dans la région de Notre-Dame-de-Stanbridge.

«Dans Brome-Missisquoi, on n’en est plus aux projets-pilotes. Les plantations d’arbres et d’herbacés en milieu agricole datent de plusieurs années déjà et leur impact sur les activités agricoles et les milieux riverains commence même à être pas mal documenté», signale le chercheur et géographe Charles Lussier.

Dans un article publié le printemps dernier dans le magazine Progrès forestier, ce dernier rappelle que le secteur ouest de la MRC de Brome-Missisquoi bénéficie aujourd’hui d’un réseau de 30 km en haies brise-vent et bandes riveraines. On parle plus précisément d’un réseau d’arbres de 25 km (11 200 plants) et d’un réseau d’arbustes de 8 km (3 500 plants).

«Depuis 2002, la CSBVRB a planté 11 175 arbres sur près de 80 sites agricoles chez une cinquantaine de producteurs de la région de Bedford afin d’améliorer la qualité de l’eau et les milieux riverains. Un autre projet, Agrosylviculture riveraine de Missisquoi (ARM), a par ailleurs été mis en place en 2012 et 2013 pour entretenir le réseau riverain et améliorer les connaissances sur la croissance d’arbres associés aux grandes cultures. Des travaux d’inventaire sur la flore herbacée, les insectes, oiseaux (…) et les maladies ont également été faits dans le but de comprendre l’écologie de ces nouvelles plantations», résume M. Lussier.

Au dire de ce dernier, le projet ARM a contribué à l’acquisition de connaissances techniques et scientifiques sur la croissance d’arbres dans les haies brise-vent riveraines et sur la nouvelle biodiversité – souvent bénéfique pour les cultures –  associée à ces nouveaux corridors forestiers.

L’importance de l’entretien

Quelque 25 espèces d’arbres indigènes – 17 espèces de feuillus et huit espèces de résineux –  ont notamment été plantées en bandes sur plusieurs kilomètres aux abords des cours d’eau. Règle générale, les feuillus et les conifères sont plantés en alternance à 75 cm ou un mètre de distance les uns des autres.

Pour garantir la survie des arbres et éviter qu’ils soient étouffés par les herbacés, les agrosylviculteurs ont pris soin d’entourer les jeunes plants d’un paillis de plastique de couleur noire qui sera retiré, après sept ou huit ans, une fois que les arbres auront pris leur ère d’aller.

Des travaux de débroussaillage seront par ailleurs nécessaires pour faciliter la croissance des arbres de moins de deux mètres de hauteur. On aura ensuite recours à l’élagage pour retirer les branches nuisibles. Les retailles restent par terre et empêchent du même coup la pousse des herbacés.

Le remplacement des arbres morts et l’utilisation de répulsifs odorants pour éloigner les cerfs contribuent également au développement maximal des plantations.

«Les croissances obtenues sont très bonnes et s’apparentent ou dépassent celles de plantations du sud du Québec (…) Les mélèzes hybrides atteignent en moyenne une hauteur de 8 m et les chênes rouges une hauteur de près de 3,75 m après neuf ans de croissance», indique M. Lussier.

Si la croissance des arbres est généralement plus rapide en milieu agricole riverain qu’en forêt, les coûts d’entretien suivent la même tendance…

«Pour les regarnis, le coût d’un arbre est environ 20 % plus dispendieux en agrosylviculture qu’en foresterie vu les nombreux déplacements entre les sites, leur longueur et le peu d’arbres à remplacer par site», ajoute M. Lussier.

Impact sur le milieu

En plus de servir d’écran contre le vent et de fournir de l’ombre aux cours d’eau, les lisières d’arbres en milieu agricole favorisent la présence de certaines espèces d’insectes bénéfiques aux grandes cultures et de certaines espèces d’oiseaux – 56 espèces recensées–  qui les utilisent comme perchoir et pour la nidification (dans près de 20 % des cas).

«Par nos études, on tente notamment de déterminer dans quelle mesure ces oiseaux peuvent être utiles à l’agriculture en mangeant les petits rongeurs et en aidant à contrôler les insectes nuisibles», explique M. Lussier.

Ce dernier prend également soin de rappeler que les haies brise-vent et les bandes riveraines offres des bénéfices environnementaux à plus long terme en séquestrant le CO2 présent en milieu agricole.

NDLR: Le magazine Progrès forestier est publié quatre fois l’an par l’Association forestière du sud du Québec.

 

Profil du réseau agroforestier riverain

. 27 km de haies brise-vent riveraines et lisières boisées

. 8 km de lisières d’arbustes et 600 m de travaux de génie végétal

. 90 sites répartis le long des cours d’eau du bassin versant

. 8 km de haies brise-vent ceinturant les bâtiments agricoles