La MRC déçue de la CPTAQ

Le conseil des maires de la MRC de Brome-Missisquoi se dit «déçu» et «mécontent» de l’orientation préliminaire défavorable rendue par la Commission de protection du territoire agricole du Québec (CPTAQ) dans le dossier Aventure sur la paille, un projet de gîte à la ferme élaboré par un couple de producteurs maraîchers bio de Stanbridge East.

La résolution adoptée le 21 août dernier, lors de l’assemblée mensuelle de la MRC, laisse entendre que ce type de projet cadre parfaitement avec les actions mises en œuvre dans la foulée du Plan de développement de la zone agricole (PDZA) et poursuit la mission de la région de Brome-Missisquoi en matière d’agrotourisme.

«Le PDZA vise à valoriser le territoire et les activités agricoles de Brome-Missisquoi, notamment en favorisant les expériences agrotouristiques qui permettent un rapprochement entre ruraux et urbains (…) et mènent à l’éducation et à la sensibilisation du public», rappelle l’auteur de la résolution, le maire Pierre Pelland, dans l’avant-propos de la résolution.

La municipalité de Stanbridge East avait déjà appuyé la demande de Claire Lanctot et Nassereddine Boumenna en alléguant que le projet répondait à plusieurs des orientations de son plan d’urbanisme (soutenir les activités complémentaires à l’agriculture, favoriser les activités liées à l’agrotourisme, développer, soutenir et innover en matière de tourisme). Selon les informations transmises par l’officier municipal, la demande est par ailleurs conforme au règlement de zonage et aux mesures de contrôle intérimaire.

Le Centre local de développement (CLD) de Brome-Missisquoi a par ailleurs reconnu l’originalité du projet, le printemps dernier, en lui décernant le premier prix de la catégorie bioalimentaire au concours local d’entrepreneuriat.

Position de la CPTAQ

La CPTAQ estime que la demande du couple de Stanbridge East doit être refusée «pour préserver l’homogénéité de l’exploitation agricoles concernée» et «pour maintenir au maximum les conditions favorables au développement de l’agriculture».

La CPTAQ allègue que les différents usages prévus pour la bergerie (gîte, étable, entrepôt d’équipements agricole) «ne semblent pas compatibles». Elle dit également craindre que les activités agricoles soient éventuellement évacuées de la grange et qu’à terme l’imposant bâtiment ne soit utilisé qu’à des fins d’hébergement.

«La Commission se doit de rester fort prudente et vigilante quant aux activités non agricoles qui sont plus susceptibles de prendre de l’expansion. La Commission considère toujours qu’une fois l’autorisation accordée, il devient difficile de contrer l’effet d’aggravation ou d’entraînement», indique le vice-président de la CPTAQ, Yves Baril, dans le document rendant compte de la position préliminaire de cet organisme voué à la protection du territoire agricole.

Toute personne désirant émettre une opinion au sujet de l’orientation préliminaire de la CPTAQ avait 30 jours, soit jusqu’au 12 août, pour se manifester.

La chance au coureur

Claire Lanctot et Nassereddine Boumenna ont contesté par écrit les conclusions de la CPTAQ, mais souhaitent laisser la chance au coureur avant de monter aux barricades.

«Nous pensons que nos arguments sont très forts et que la CPTAQ comprendra le bien-fondé de notre projet à la lueur des éclaircissements que nous lui avons transmis par courrier électronique», indique M.Boumenna.

Ce dernier rappelle que l’entreprise familiale tire la majorité de ses revenus de la production maraîchère tout en faisant un peu d’élevage (moutons et bouvillons). Il ajoute que le projet de gîte à la ferme ne viendra en aucune façon transformer la nature de l’entreprise agricole.

Le couple a acheté une vieille ferme laitière – dépourvue d’animaux – à Stanbridge East, voilà quatre ans, dans le but de faire du maraîchage biologique. Après avoir appris l’existence du réseau Aventure sur la paille, un groupe de fermiers suisses qui, depuis deux décennies, transforment certaines de leurs bâtisses agricoles afin d’accueillir des gens intéressés à séjourner à la ferme une ou plusieurs nuits. Ces derniers dorment sur la paille, de là le nom du projet.

«La conversion d’une partie de la grange existante en gîte rustique nous permettrait de diversifier nos activités  et de mettre en valeur les produits de la ferme (petits fruits, œufs, etc.) au petit déjeuner tout en utilisant des espaces inutilisés. Cette initiative fournirait également l’occasion à des citadins de se familiariser avec les mille et une facettes de la culture maraîchère bio et de vivre pleinement l’aventure agricole», explique Claire Lanctôt.

Le projet prévoit la «cohabitation» d’animaux et d’êtres humains dans un même bâtiment, mais sur deux niveaux de plancher distincts: les moutons et bouvillons au rez-de-chaussée, les citadins à l’étage. Il faut préciser que les animaux passent l’été dans les pâturages.

«La réalisation du projet nécessite l’installation de l’électricité et d’un bloc sanitaire comprenant trois toilettes et trois douches. Nous devrons également aménager une fosse septique et un champ d’épuration, mais il n’est aucunement question de construire un nouveau bâtiment. L’étage de la grange existante suffira à nos besoins», prend soin de rappeler M.Boumenna.