Les vignerons réclament une rencontre d’urgence avec Philippe Couillard

VITICULTURE. L’Association des vignerons du Québec demande une rencontre d’urgence avec le premier ministre Philippe Couillard pour discuter des coupures au niveau du programme de soutien à la commercialisation.

«Les vignobles reçoivent 6 $ par bouteille de la Société des alcools du Québec. La société d’État se revire de bord et revend cette même bouteille 16 $. On parle ici d’une majoration de 145 %. Il faudrait que le gouvernement soit moins gourmand et d’offre un réel soutien aux viticulteurs, comme c’est le cas en Ontario, en Colombie-Britannique et en Nouvelle-Écosse», insiste Charles-Henri de Coussergues, copropriétaire du vignoble de L’Orpailleur et président ex-officio de l’Association des vignerons du Québec.

Le gouvernement du Québec s’était engagé à remettre aux viticulteurs une partie des profits réalisés par la SAQ avec la vente des vins québécois (4 $ sur le 10 $ de profit généré par la vente d’une bouteille) et, ce, pour une période de trois ans (2014-2015-2016). La remise pour 2015 sera de 1 $ par bouteille et non de 4 $ comme il avait été entendu

«En vertu de cette entente, notre vignoble aurait dû recevoir un crédit de 300 000 $ pour l’année 2015. Or, on vient de nous aviser que le montant du chèque sera plutôt de 100 000 $», précise M. de Coussergues.

Ce dernier comprend mal comment le gouvernement du Québec peut ainsi changer la donne de façon unilatérale, en fin d’année, alors que les dépenses de promotion ont déjà été engagées

«C’est d’autant plus surprenant que le ministre des Finances affirmait encore l’été dernier que le programme serait honoré», ajoute le copropriétaire de L’Orpailleur.

L’Association des vignerons du Québec demande une rencontre d’urgence avec le premier ministre Philippe Couillard dans le but de clarifier la situation.

«S’il n’y a pas d’oreille attentive, il y aura des moyens de pression, c’est sûr», ajoute M. de Coussergues, sans fournir plus d’explication.

Lutter à armes égales

Selon Charles-Henri de Coussergues, le Québec perd des millions en retombées économiques en raison du «désintérêt de l’État» envers ses vignerons.

«La production québécoise représente moins de 1 % de tout ce qui se consomme ici, soit 1,8 sur 220 millions de bouteilles, alors que les vignerons ontariens produisent 40 % de tous les vins vendus dans cette province», signale le vigneron de Dunham.

Ce dernier estime que le soutien gouvernemental demeure essentiel au développement de la viticulture québécoise, car les producteurs d’ici sont en compétition avec des vignerons étrangers «fortement subventionnés». Il cite, à titre d’exemple les 15 milliards d’euros versés aux vignerons européens en 2015 sous forme d’aide à la plantation, à la production, à la mise en marché et à l’exportation.

«Nous avons réussi à apprivoiser le climat, mais il faut croire que l’on n’a pas encore réussi à apprivoiser la classe politique», déplore-t-il.

M. de Coussergues croit néanmoins que l’entrée en vigueur du projet de loi 88 donnerait donner un coup de pouce aux vignobles québécois sans nécessairement régler tous leurs problèmes. Les auteurs du projet de loi préconisent la vente du vin d’ici dans les épiceries et l’émission de permis permettant des opérations de distillation sur une base artisanale et la vente de ces produits à la ferme.

«Le projet a été déposé avant Noël et il y aura commission parlementaire en 2016. Comme les trois principaux partis sont tous d’accord, il ne devrait pas y avoir trop d’opposition. Il reste à espérer que tout soit réglé pour l’été prochain», indique M. de Coussergues.