Un Farnhamien veut récupérer son droit à l’aide sociale

INDÉPENDANCE FINANCIÈRE. À la suite de son passage à l’émission d’affaires publiques de Denis Lévesque au réseau LCN, le Farnhamien Marc-Alexandre Gaudreau continue de se battre pour son droit à l’aide sociale.

Bien qu’il ait été déclaré invalide de longue durée et soit considéré comme inapte au travail, l’homme de 27 ans n’a pas droit à une rente d’invalidité faute d’avoir travaillé assez longtemps. Il a pu bénéficier de prestations d’aide sociale pendant plusieurs années avant que les fonctionnaires lui coupent les vivres en invoquant le fait qu’il vit désormais sous le même toit que sa conjointe Marilyne Samson. Cette dernière doit subvenir aux besoins de son copain et à ceux de leur fils de 14 mois malgré ses revenus relativement modestes.

«Il y a 8,2 millions de personnes au Québec et la seule personne avec qui je ne peux pas habiter sans être coupé, c’est la mère de mon enfant. Vous admettrez que c’est blessant», signale M. Gaudreau.

Le Farnhamien touchait pourtant des prestations d’aide sociale à l’époque où il vivait à Laval avec sa mère. Une personne seule avec contraintes sévères a normalement droit à un chèque de 954 $ par mois.

M. Gaudreau pouvait également obtenir le remboursement de ses médicaments, mais a perdu cet avantage en même temps que ses prestations d’aide sociale.

«Ma conjointe doit débourser 180 $ par mois pour mes médicaments. Je me sens dépendant d’elle comme je ne l’avais encore jamais autant été», déplore-t-il.

En aménageant ensemble, Marc-Alexandre et Marilyne étaient prêts à accepter une diminution des prestations d’aide sociale versées à l’un deux, mais ne s’attendaient aucunement à une coupure complète.

«Nous avons voulu jouer franc jeu, mais ça s’est retourné contre nous», déplore Mme Samson.

Marc-Alexandre Gaudreau a soumis son dossier à l’organisme Action Plus Brome-Missisquoi dans l’espoir d’obtenir un peu d’aide. Il compte par ailleurs rencontrer le député provincial de Brome-Missisquoi pour le sensibiliser à sa cause.

«La diffusion de notre entrevue avec Denis Lévesque au réseau TVA devrait également contribuer à faire avancer les choses. Il n’y a pas de place au Québec pour les cas d’exception comme le mien, mais les gens ne sont pas au courant de ça», explique-t-il.

Position d’Action Plus 

Action Plus Brome-Missisquoi comprend mal comment on peut nier le droit à une vie de couple aux personnes ayant recours à l’aide sociale.

«Pour ces personnes, faire vie commune avec l’être aimé signifie une diminution ou une annulation des prestations d’aide sociale pour cause de vie maritale», déplore la coordonnatrice de l’organisme, Jacynthe Tremblay.

Action Plus Brome-Missisquoi considère cette situation inacceptable et réclame que chaque personne exclue du marché du travail puisse recevoir son propre chèque d’aide sociale, et ce, même en situation de colocation.

«Personne n’a envie de dépendre financièrement de l’autre. Le droit d’aimer devrait être accessible à tous sans que l’on ait à craindre des coupures», ajoute la coordonnatrice de ce regroupement voué à la défense des droits des personnes assistées sociales.

Jacynthe Tremblay prend soin de rappeler que les organismes communautaires revendiquent depuis près de deux décennies le principe de une personne, un chèque.

«L’émission d’un seul chèque par couple recevant de l’aide sociale crée un sentiment de dépendance envers la personne qui reçoit le chèque et peut même conduire à de la violence économique. Les coupures à l’endroit des conjoints habitant sous un même toit engendrent également des tensions liées à un affaiblissement de leur pouvoir d’achat et peuvent même conduire à une séparation. Des histoires d’horreur comme celle de Marc-Alexandre, il y en a des milliers au Québec», poursuit Mme Tremblay.

Perte de son indépendance

Marc-Alexandre Gaudreau ne l’a pas eu facile au cours de la dernière décennie et aurait très bien pu être un candidat au suicide. C’était sans compter sur sa volonté de vivre et l’appui indéfectible de sa copine, tout comme celui de sa mère.

Après l’obtention d’un diplôme d’études professionnelles en carrosserie automobile dans un centre de formation de Montréal, le jeune homme alors âgé de 19 ans a été embauché par Carotech, une entreprise de Laval. Il y a travaillé pendant huit mois, soit d’août 2010 à avril 2011, avant de voir sa vie basculer du jour au lendemain.

Deux jours après une crise d’épilepsie, Marc-Alexandre est allé consulter un médecin et s’est prêté à une batterie de tests qui ont révélé la présence de deux tumeurs au cerveau. Un accident de chirurgie, survenu lors d’une biopsie, aurait contribué à aggraver son état.

«Je n’ai jamais pu retravailler par la suite. Ce n’est pas que je ne veux pas, c’est plutôt que je ne peux pas», insiste-t-il.

Le surlendemain de la biopsie, son bras droit a cessé de fonctionner pendant une dizaine de jours. Il a par la suite retrouvé une partie de ses fonctions, mais rien n’est encore parfait.

«J’ai perdu beaucoup de force et de motricité. J’éprouve également des étourdissements, pertes d’équilibre, troubles d’élocution et je ne suis plus capable d’écrire lisiblement de la main droite. Depuis la biopsie, je n’ai pas non plus remis les pieds sur une patinoire», indique celui qui démontrait jadis de belles aptitudes pour le hockey.

M. Gaudreau est toujours sur médication (15 pilules par jour) et dort également beaucoup, soit huit heures de nuit et de deux à quatre heures de jour.

«Le plus difficile, c’est mon sentiment de dépendance envers mes proches. Je ne vois pas le jour où je pourrai vivre de façon autonome, sans être un poids pour les autres. À la longue, ça devient dur sur le moral et sur l’estime de soi, car je reçois constamment de l’aide sans pouvoir redonner en retour. C’est à sens unique…», poursuit-il.